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Les Petits Riens, ASBL inspirante : découvrez ses secrets de longévité !

L’ASBL Les Petits Riens a ouvert de nombreuses boutiques à Bruxelles et en Wallonie pour financer des centres d’accueil pour sans-abris. Depuis sa création dans les années 30, ses équipes n’ont cessé d’innover pour développer ses activités. Sa chargée de communication Claudia van Innis vous donne des pistes de réflexion pour faire prospérer votre ASBL !

Fondée en 1937 par l’Abbé Froidure, l’ASBL Les Petits Riens fête ses 85 ans ! Avec la création de ses habitats solidaires, Les Petits Riens organisent des collectes de vêtements de seconde main : la récolte et le tri des vêtements créent de l’emploi pour les sans-abris. En 1955, Les Petits Riens ouvrent officiellement leurs locaux à Ixelles pour organiser des espaces de ventes et d’hébergement. Aujourd’hui, la structure prospère fonctionne en réseau de 27 magasins de seconde main en Belgique. 

Leur chargée de communication, Claudia van Innis, explique que l’association a été guidée dans son évolution par une soif d’entreprendre et d’innover : “Notre créativité nous a permis de nous adapter aux changements de société”, ajoute-t-elle.

Dans cet épisode de notre série dédiée aux ASBL inspirantes, Les Petits Riens vous livrent leurs 5 conseils pour connaître la même success story

1. Diversifier et créer ses sources de financement  

Les financements des Petits Riens reposent sur trois piliers : les dons privés, les subsides et les revenus des boutiques. Ce fonctionnement permet de varier les sources de revenus et chaque pilier est essentiel. Avec les revenus des boutiques, Les Petits Riens gagnent un peu plus en autonomie et essaient de garder un équilibre entre leurs trois piliers de financement.  

La question de la rentabilité pour une ASBL avec une mission sociale est délicate : ses activités doivent répondre aux besoins de ses bénéficiaires et en même temps générer des financements. “Les magasins sont un bon exemple de l’équilibre entre l’économique et le social : ils ont un objectif social de proposer des biens de qualité à petits prix, mais doivent aussi générer de l’argent”, explique Claudia van Innis. En se tournant vers le grand public avec leurs boutiques, Les Petits Riens développent leurs activités autant auprès des consommateurs que des personnes en situation de précarité : “Nous nous adressons à des personnes très différentes, notre public cible inclut toute la Belgique”, sourit-elle.  

“Lorsqu’une ASBL s’adresse à un public cible aussi vaste, elle doit trouver l’équilibre adéquat pour rester au plus proche de ses bénéficiaires et en même temps intéresser les consommateurs pour satisfaire ses objectifs de rentabilité, mais ce n’est pas simple”, reconnait-elle.    

Lire aussi : Comment une ASBL peut financer elle-même ses activités ? 

2. Garder le cap en attendant que les projets deviennent rentables  

Le succès des Petits Riens est semé d’innovations et certaines sont plus risquées que d’autres… Pour incarner ses ambitions environnementales, l’ASBL a récemment lancé sa propre marque de textile upcyclé le Label Jaune, mais ce projet n’est pas encore porteur.  

Néanmoins, l’équipe persiste malgré son faible succès : “C’est un risque à surmonter pour une ASBL : même si le Label Jaune n’est pas rentable dans l’immédiat, nous continuons quand même d’investir dans ce projet pour atteindre nos objectifs environnementaux. Il est cohérent avec nos activités, nous devons être exemplaire dans nos principes et ne pas les réduire à des slogans sur des t-shirts", explique Claudia van Innis. “Néanmoins, il faut toujours trouver l’équilibre pour savoir jusqu’à quand nous pouvons nous permettre ce manque de rentabilité”, ajoute-t-elle.  

3. Coopérer avec d’autres ASBL   

Pour Claudia van Innis, Les Petits Riens ont aussi appris à coopérer avec d’autres ASBL au fil de leur évolution : “Nous avons la volonté de travailler de plus en plus en réseau. En coopérant avec d’autres ASBL, nous n'avons pas à créer une nouvelle structure pour chaque besoin social constaté sur le terrain”, explique-t-elle. “Là où il y a 15 ans, on pouvait nous accuser d’être très centrés sur nous-mêmes, il y a eu un changement historique au sein des Petits Riens pour s’ouvrir vers l’extérieur. Dans le secteur associatif, cela permet d’échanger des bonnes pratiques entre ASBL et de bénéficier de l’expertise de chacune”, reconnait-elle.  

Non seulement les autres ASBL peuvent être une source d’inspiration pour vos activités, mais mettre en place des projets communs vous permet d’éviter certains coûts et de gagner en efficacité dans vos activités.  

Lire aussi : Partenariat entre associations : comment le formaliser ? 

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4. Ne pas sous-estimer le poids du succès  

Le succès des Petits Riens auprès du grand public décolle pour de bon dans les années 90 avec l’ouverture des premières boutiques. En changeant sa méthode de collecte, l’ASBL a augmenté ses capacités de tri, permettant l’ouverture des premières boutiques pour écouler les stocks de marchandises.  

Mais le succès d’une ASBL peut parfois dépasser ses moyens logistiques et techniques. C’est ce qui est arrivé aux Petits Riens en 2015 avec l’ouverture de leur centre de tri de 9.000 m2 : “L’arrivée au centre de tri et l’important changement d’échelle qui l’a accompagné ont fragilisé Les Petits Riens. Il y avait un écart entre la progression de nos activités et nos capacités logistiques, et cet écart s’est particulièrement ressenti sur le terrain : nous avons été dépassés au niveau interne”, se souvient Claudia van Innis.   

Cette période charnière pour l'association s’est révélée enrichissante car elle a permis de professionnaliser ses activités. Néanmoins, une structure peut anticiper ses changements d’échelle pour faire face à l’intensification de ses activités, autrement son succès pourrait lui desservir.  

5. Développer des activités cohérentes avec la mission de l’ASBL  

Le secret de longévité des Petits Riens est double : d’une part, l’ASBL a suivi l’évolution des besoins du terrain. D’autre part, elle s’est adaptée aux changements de perceptions de la seconde main : “Dans les années 90, la seconde main était encore vue comme sale ou pour une clientèle pauvre. Les Petits Riens avaient alors une connotation presque trop sociale et péjorative”, explique Claudia van Innis.  

Malgré ce succès, Les Petits Riens font face à un important besoin de cohérence dans leurs activités. En effet, lorsqu’une ASBL développe ses activités auprès du grand public, elle peut perdre de vue sa mission initiale. L’équipe s’en est notamment rendue compte en organisant ses défiles annuels de 2003 à 2015. Ces évènements fédérateurs permettaient de récolter des fonds grâce à la vente aux enchères des vêtements et garantissait à l’ASBL une présence médiatique annuelle. Mais au fil des années, le projet a perdu son impact social : “Cet évènement devenait de plus en plus à la mode, on ne parlait que de notre activité économique et c’était difficile de faire la lumière sur le social”, regrette Claudia van Innis. “Les défilés commençaient à nous desservir et nos activités perdaient de leur cohérence”, poursuit-elle.  

Dans ce souci de cohérence, Les Petits Riens ont fondé leur chaire universitaire en partenariat avec l’UCL en 2015 : “Cette chaire permet de mesurer notre impact social et de questionner nos pratiques en confrontant nos activités”, explique Claudia van Innis. “Pour développer son activité au long terme, une ASBL doit toujours remettre ses activités en question et rester à l’écoute de ses publics, aussi variés soient-ils. C’est un processus qui peut être très confrontant, mais il ne faut jamais avoir peur de questionner son évolution pour garder sa cohérence d’action”, conclut Claudia van Innis.

Luisa Gambaro

Découvrez la série sur les ASBL inspirantes :